LE MOTIF raconte comment l’éloignement, l’enfermement et la solitude ont boosté sa créativité
Musique - 26.5.2020
Après nous avoir offert son journal de bord en quarantaine, le producteur LE MOTIF se confie et nous explique comment l’isolement et la créativité musicale peuvent parfois s’accorder : “je suis de nature assez casanière”.
Si certains cuisiniers gardent précieusement leurs secrets et recettes, on peut dire que LE MOTIF est lui plutôt du genre généreux. Pendant les deux derniers mois où nous avons dû rester toutes et tous cloîtrés chez nous, ce producteur urbain a décidé de partager à ses fans les bases techniques pour “faire un tube” et de détailler également la conception d’un clip maison, sans aucune aide extérieure. Et force est de constater que ses conseils étaient pertinents, à l’écoute de son dernier single NEXT :
Après avoir posé la question à YUKSEK puis à AGAR AGAR, qui ont tous deux sortis des clips ou EP à la fin de cette période trouble, nous avons donc demandé à LE MOTIF comment sa créativité avait été altérée par cette quarantaine…
Est-ce que tu as produit pour toi ou les autres pendant la quarantaine ?
LE MOTIF : J’ai uniquement produit pour moi, j’en ai profité pour consolider le répertoire de mon premier projet. J’ai enregistré mon dernier single Next qui est disponible sur les plateformes pendant la quarantaine justement.
A quelles difficultés tu as dû faire face ?
La plus grande difficulté que j’ai dû surmonter c’est l’éloignement avec mes enfants qui sont confinés chez leurs grands parents dans une autre Belgique. Bien que j’ai choisi de rester confiné, j’ai été démangé tout le long par le dilemme d’aller les retrouver et donc d’exposer leurs grands parents à un risque ou de rester loin d’eux. Mis à part ça je préfère relativiser.
La quarantaine est une question de santé publique, je préfère mille fois vivre et voir mon prochain vivre en bonne santé que gambader dans les parcs au risque d’être contaminé et contaminer. Beaucoup de gens sont enfermés dans des situations plus précaires que les miennes, d’autres peuples traversent des situations beaucoup plus difficiles depuis bien plus longtemps et ce ne sera pas la dernière crise ce prochain siècle que l’humanité va devoir faire face à… vu comme ça, je ne suis pas trop à plaindre si ma seule contrainte est de rester dans le confort de chez moi pendant deux mois.
Est-ce que pour toi ce confinement ce n’est pas finalement… une situation classique de producteurs ?
Oui elle y ressemble beaucoup. L’enfermement, l’isolement, la solitude face à son ordinateur, etc… Par contre le manque d’interaction humaine est ce qui en fait une situation extraordinaire. La création musicale, à quelques rares exceptions, est toujours le fruit d’échanges entre individus. Je suis un grand avocat de la collaboration et il y aura toujours quelqu’un qui sera plus talentueux que toi.
Aujourd’hui dans la mesure où tu peux installer du matériel professionnel d’enregistrement chez toi, la seule fonctionnalité restante du studio c’est de servir de point de rencontre entre les meilleurs talents de chaque discipline nécessaire a la composition, l’écriture et l’enregistrement d’un morceau. Les musiciens, les producteurs, les toplineurs, les ingénieurs, les amis qui donnent les conseils, les rencontres qui donnent l’inspiration, etc…
Quelles sont les sources de « repos » que tu trouves d’habitudes après une journée enfermé dans ton studio, sur lesquelles tu ne pouvais pas t’appuyer ?
En général après une journée dans mon studio, je rentre chez moi et je passe la soirée dans mon home studio 😂. Je suis de nature assez casanière Je kiffe tellement ce que je fais que c’est mon métier, mon hobby et mon passe-temps. Par contre, mes enfants étant confinés avec leur mère dans un autre pays, je ne pouvais pas les voir. Et bien qu’on passe des heures au téléphone chaque jour, leur présence me manque énormément. Ça m’a énormément déstabilisé au tout début. Mais pour le bien sanitaire de tous on a appris à prendre notre mal en patience et je ne peux pas attendre de les rejoindre!
Est-ce que tu penses que les “œuvres confinées” seront bien accueillies par le public ?
Je pense que le public ne fait pas de différence entre les oeuvres “confinées” et les oeuvres “non-confinées”. Les artistes ont employés le terme à des fins de référencement digital pour essayer de tirer leurs épingles du jeu dans ce flot continu d’articles et de reportages axés sur le confinement. Une oeuvre musicale moderne s’enregistre, en général, à huit-clos, dans un studio détaché de voisinage et nécessite plusieurs heures d’enfermement. L’interaction sociale en moins, le processus d’enregistrement d’un titre est similaire confiné ou non.
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Abigail Ainouz