4 3 2 1, Paul Auster
Arts - 13.3.2018
Quand Paul Auster décide de dévoiler son dernier livre, c’est un cadeau de 1016 pages qu’il nous présente, un pavé magistral qui trouvera aisément sa place parmi les monuments littéraires.
Cette fois-ci ce n’est pas une histoire qui est racontée mais quatre passionnantes aventures.
4 3 2 1 raconte quatre versions de la vie d’un même personnage, Archie Ferguson, de sa naissance à ses 25 ans. On suit ainsi le personnage durant 4 possibles existences.
Que serions-nous devenus si l’ un de nos parents était mort alors qu’on avait neuf ans ? Ou si notre première expérience marquante avait eu lieu avec un garçon plutôt qu’une fille? Et si notre ami le plus proche était mort subitement à quatorze ans? Si un accident de voiture nous avait mutilé la main alors qu’une grande carrière sportive s’ouvrait à nous?
Toutes ces questions deviennent les aléas de la vie du jeune personnage que nous suivons, intensément.
On se sent étrangement et rapidement proche d’Archie.
Voir Paul Auster sculpter près de nous ce personnage dès la première page, cet enfant devenir au fil des pages un jeune adulte, dicté par ses passions, ses envies, ses idéaux.
Ce jeune gamin qui sur fond d’une Amérique en pleine mutation (Martin Luther King, la lutte pour les droits civiques, les émeutes urbaines, l’assassinat de JFK et la guerre du Viêt-nam) se questionne comme nous sur l’importance des existences.
Une période qui fascine Paul Auster, âgé aujourd’hui de 70 ans. “Mon désir, c’était d’écrire un livre sur la jeunesse. C’est un livre sur le développement humain, et les 20 premières années de la vie sont les plus intéressantes (…) On arrive après 20 ans à l’âge d’un jeune adulte, c’est un incroyable chemin”, poursuit-il.
On comprend alors Archie à travers les tumultes de sa jeunesse : sa peine de ne pas avoir un petit frère, ses frustrations quand les amours ne sont pas partagées, la relation unique qu’il ficelle avec sa mère.
Mais aussi la première fois qu’il découvre la beauté du cinéma, la littérature ou la fierté d’un premier récit qu’il écrit avec l’idée secrète de vouloir devenir écrivain.
Paul Auster joue avec les petites choses de la vie, celles qui touchent autant Archie Ferguson que les personnages qui l’entourent.
Dans une vie sa tante divorce, dans l’autre elle se remarie offrant ainsi au personnage principal un cousin qui le pousse à devenir écrivain.
Dans une vie Archie est pauvre, dans une autre ses parents font fortune.
On retrouve les mêmes personnages mais à chaque fois différemment mise à part ces histoires d’amour.
Qu’importent les vies, on retrouve toujours la même fille au côté d’Archie, une certaine Amy.
4 3 2 1 c’est aussi un système narratif jamais vu auparavant. Les chapitres ne se suivent pas, ils sont découpés parallèlement sur quatre directions. On passe de 1.0 à 1.1, 1.2, 1.3, 1.4, 2.1, 2.2, 2.3, 2.4 et ainsi de suite jusqu’à la fin. On est donc tenté de lire un chapitre sur quatre (le 1.1, puis le 2.1, le 3.1 et ainsi de suite jusqu’au 7.1) afin de reconstituer chronologiquement chaque histoire, mais si Paul Auster choisit ce système-là c’est sûrement une raison qu’il faut respecter.
Il ne faut donc pas avoir peur de ne pas se souvenir de tous les détails des 4 versions d’Archie car finalement c’est un peu ça la vie : se perdre dans l’incertitude.
Matteo est sur Instagram @matteoveca