Fassbinder à la Cinémathèque, retour sur un cinéaste transgressif
- 11.4.2018
A cause d’excès en tous genres, Rainer Werner Fassbinder n’a vécu que 37 ans.
Pourtant, avec un rythme de production quasi psychotique, il réalise 42 films et écrit une vingtaine de pièces de théâtre. Sa vitesse de production s’explique tant par le besoin vital de créer que par une certaine forme de maladie mentale qui le pousse sans cesse à l’excès.
L’ensemble de son œuvre s’articule autour des rapports de domination entre les individus. Obsédé par la figure du marginal (auquel il s’identifie), Fassbinder met en lumière les processus d’exclusion de ceux qui ne correspondent pas à la « norme ». Il puise donc son inspiration dans ce que l’Allemagne cherche à oublier : l’antisémitisme, la xénophobie et l’homophobie.
Si vous ne jurez que par l’esthétisme de Wes Anderson ou la photographie de Sofia Coppola, passez votre chemin, Fassbinder ne fait pas dans la beauté consensuelle ou poétique. Ses oeuvres sont crues, lucides et abîmées.
A l’occasion de la rétrospective que lui consacre la Cinémathèque Française du 11 avril au 16 mai, retour sur ce cinéaste hors norme, en trois œuvres aussi sombres que transgressives.
Tous les autres s’appellent Ali, sorti en 1974 raconte l’histoire d’Emmi, veuve allemande d’une soixantaine d’années qui rencontre Ali, un immigré marocain bien plus jeune. Ils tombent amoureux et se marient pour régulariser la situation d’Ali. Ils font alors face à une Allemagne raciste et se retrouvent peu à peu marginalisés.
L’exclusion subie par Ali et Maria se ressent tant dans le scenario que dans le cadrage utilisé par Fassbinder, puisqu’il le ressert de façon à ce qu’il coïncide avec le cloisonnement progressif des personnages.
Les Ordures, la Ville et la Mort est une pièce écrite en 1975 qui met en lumière ce que l’on cherchait d’ordinaire à dissimuler : les prostitués, les maquereaux, les infirmes de la seconde guerre mondiale et l’antisémitisme, qui, s’il n’est plus institutionnel reste très présent socialement. A sa sortie, on assimilera le discours de la pièce à celui de Fassbinder. Elle sera donc interdite et ne pourra être jouée qu’une vingtaine d’années plus tard, provoquant toujours le scandale.
Le Mariage de Maria Braun, sorti en 1979 est la métaphore de l’Allemagne de la reconstruction, obsédée par la consommation et le bien matériel.
Pendant la seconde Guerre mondiale, Maria voit son fiancé Hermann partir au front. Elle rencontre Bill, un américain et entame une relation amoureuse avec lui. Lorsqu’Hermann rentre finalement, Maria assassine Bill. Hermann s’accusera du crime et devra encourir une lourde peine de prison. A nouveau séparée de son mari, Maria acceptera de louer son corps à un riche industriel, qui en échange, promet de lui léguer une partie de sa fortune.
Clara H.