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Sous l’alias de Destiino, Yuksek laisse éclater sa face sombre

Yuksek/Destiino par Benpi

Avec Afsila, Yuksek embrasse l’alias de Destiino et nous hypnotise avec un premier EP sombre, entre techno et ambient. Rencontre téléphonique avec le producteur originaire de Reims, à peine sorti de studio.

Ça aurait pu s’appeler vruyefbjzhbejzkh ou grossemerdeprojet1, mais je me disais qu’Afsila, ça sonnait quand même beaucoup mieux, sans vouloir dire quoique ce soit”. C’est ainsi que Yuksek, Pierre-Alexandre Busson dans le civil, explique le titre énigmatique de son dernier projet, Afsila. Un titre énigmatique pour un “premier” EP qui l’est tout autant.

Afsila, c’est du Yuksek sans être du Yuksek. C’est d’ailleurs pour ça qu’il ne le sort pas sous l’appellation qu’il revêt depuis 2006 mais sous un alter-ego plus tourmenté, Destiino. Destiino, parce qu’il doit la (sur)vie de ce side-project au destin. 

Il y a des moments où je suis en studio, que je ne suis pas dans le mood pour faire des choses un peu pop, un peu joyeuses comme ce que je signe sous le nom Yuksek, et où je n’ai pas non plus de commandes de bandes-son. Donc j’expérimente, je bidouille, je m’amuse avec mes synthétiseurs analogiques.

Ce qui était une façon de passer le temps va devenir un peu plus “officiel” sans trop l’être lorsqu’en 2017, Yuksek est invité par Xavier Veilhan au Studio Venezia pour une performance pendant la Biennale de Venise. Destiino va naître durant ces sessions, parfois ouvertes aux curieux

Perturbations

C’était perturbant pour moi comme pour le public, parce que les gens s’attendaient à y trouver un vrai concert, alors que c’était vraiment du travail de studio. Parfois, j’arrivais à leur sortir un morceau, mais c’était surtout des essais sur des sonorités ou des textures. Mais c’était aussi l’idée du projet : leur montrer le cœur de la création.”

Il faudra cependant attendre 2020 pour que ces morceaux bien plus sombres et ambiants que ce à quoi le DJ Champenois nous avait habitué, aux bruitages parfois délicieusement dérangeants (comme ces basses roulantes composant l’introduction de Sine, qui ouvre ce bal sombre et que l’on sent racler nos neurones), se décident à sortir du disque dur au fond duquel ils étaient enfermés. C’est une rencontre avec Chloé, fondatrice en 2017 du label Lumière Noire Records, qui va précipiter les choses. Sans même que Yuksek s’y attende, elle est instantanément séduite

Je voulais juste avoir son avis et je pensais qu’elle m’orienterait vers des gens, parce que je ne connais pas vraiment cette partie du monde de l’électro. Puis elle m’a proposé d’en faire un album et un EP.

On ne va pas se mentir, aussi qualitatif qu’il soit, Afsila nous rend un petit peu triste. Alors que le monde de la nuit est à l’agonie, que trente pour cent des clubs ont fermé définitivement leurs portes et que les festivals estivaux ne pourront se tenir qu’assis, une irrépressible envie d’écouter ces improvisations analogiques dans une backroom pleine de gens en sueur nous envahit. Et même si leur créateur ne justifie “aucune ambition particulière avec ce projet, pas même celle de tourner”, la fête aurait été bien plus agréable si elle existait encore. 

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Article : Jules Vandale