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ADRASTE – CHRONIQUEUR DE TABLE – TAKARA – N°5

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TAKARA – 14, rue Molière (Paris 1er)

J’ai du mal à dissimuler mon plaisir en rédigeant cette chronique. Je vais vous parler d’un endroit mythique, une institution, une de ces adresses qu’on ne donne qu’a ses amis : Takara. C’est un ami marié à une Japonaise qui m’a donné le tuyau. Il amène sa femme ici pour qu’elle retrouve le goût du Japon. Le lieu a une patine et une âme que seul le temps est à même de donner.

Ici, pas de master sushi aux prix stratosphériques. Il y en a pour presque toutes les bourses, selon votre faim et votre folie. Les fondues sont divines, les Nigiris Aburi Gyu (bœuf flambé avec ponzu) addictifs, les sushis de toro fondants et le calamar sur son petit brasero charmant. Tout est parfait dans ce lieu qui s’apprivoise. Les premières fois, vous aurez envie de tout goûter puis vous aurez vos préférences et serez tenté de garder pour vous cet endroit et sa sélection de whisky japonais à prix canon. C’est le plaisir des institutions. On regarde, on savoure et on remercie. Bien sûr je pourrais vous dire le sourcing-ci, le vertueux-ça, mais non. Ce lieu invite à l’apaisement et à jouir de chaque bouchée en observant autour de soi une clientèle érudite.

Je prie pour que dans l’avenir, on ne méprise pas ce lieu comme on a pu bafouer les mythiques café Costes des Halles ou Tong Yen. Feu Tong Yen devenu Kinugawa relooké pour faire plus à la mode. Peut-on parler de meurtre ? Qu’on les aime ou qu’on les déteste, peu importe mais on doit les conserver. Takara est une référence. A Paris, je pense aussi à Timgad le marocain, à L’ami Louis, au Duc ou au Stresa. Que dire de Bocuse à Collonges au Mont d’Or ? On pourrait imaginer une désignation « institution » dans le guide Michelin. Avec une approche différente pour les juger chacune différemment. Regarder ce qu’elles apportent dans le paysage, l’héritage qu’elles perpétuent. Bien souvent tenues par la même famille depuis la création, ces institutions devraient être protégées le jour où les propriétaires décident de vendre. Pour éviter, sous prétexte de modernisation, de changer leur identité comme c’est le cas de Tong Yen. Et pour signaler aux chanceux repreneurs leur responsabilité. Leur dire qu’aucun architecte ou communiquant, aussi génial soit-il, ne pourra surpasser l’héritage, l’histoire de ces institutions. Que c’est dur d’avoir un tel patrimoine entre ses mains, c’est comme un cheval docile qui peut être le plus fougueux des pur sang. Qu’on peut améliorer, revisiter la nourriture mais qu’on doit respecter le lieu et ses clients. Takara c’est tout cela à la fois et c’est vous qui choisirez la monture. Un lieu mythique, une cuisine pure et le gout du Japon au cœur de Paris. Molière a le Japon a ses pieds et il ne le savait pas.

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