Le love & le seum : Charles-Baptiste résume notre schizophrénique année 2020 dans son nouvel album
Musique - 12.6.2020
A l’occasion de la sortie en version physique de l’album LE LOVE & LE SEUM de Charles-Baptiste, le trublion de la chanson française 2.0 nous offre dix classiques du cinéma aussi inspirants que malaisants. A voir et revoir sans modération.
Après avoir officié comme le gentleman cambrioleur de la variété française, Charles-Baptiste est de retour (succédant à une tournée annulée et mise en quarantaine réglementaire dans son bled natal). Il nous offre un retour “moitié moitié”, mi-super héros de la chanson à béret, mi-transfuge du genre urbain à casquette. Singulier univers que nous propose le songwriter pianiste sur ce nouvel album LE LOVE & LE SEUM, soit “11 chansons pour témoigner du fonctionnement binaire de nos émotions flamboyantes préférées” et dont la sortie physique est prévue aujourd’hui, vendredi 12 juin.
Et plutôt que de nous raconter platement la genèse de ce nouveau disque, Charles-Baptiste (CB pour les amis) a choisi de nous concocter une short liste de films qui l’ont marqué, choqué ou interloqué… et sans doute inspiré dans la réalisation de ce disque LE LOVE & LE SEUM.
“Mon nouvel album est nourri par le constat du fonctionnement binaire de nos cerveaux post-Internet pré-Covid, a-t-elle encore un sens ? Ou est-ce qu’au contraire elle en a d’autant plus ? Finalement, à bien y réfléchir, LE LOVE, en ce moment, est-ce que ce ne serait pas toutes ces marques de solidarité, la qualité de l’air, le silence, l’entraide, la valorisation du système de santé, et la slow life ? Et LE SEUM, toute cette surveillance numérisée qui arrive, l’Etat policier, les futures ‘bouchées doubles’ et Amazon qui gagne à la fin ?”
10 films à (re)voir pour épicer vos soirées selon CB
Les Valseuses (Bertrand Blier, 1974)
“On est pas bien, là, à la fraiche, décontracté du gland ?” Cette réplique culte renvoie souvent à l’idée d’un film hilarant. Dans les faits, c’est beaucoup plus compliqué, et il faut aujourd’hui s’accrocher pour tenir le visionnage de certaines scènes, comme la séquence de voyeurisme sur la jeune maman Brigitte Fossey donnant le sein à son bambin.
Manhattan (Woody Allen, 1979)
Il y a eu le cas Polanski, qui complique le fait de revoir un paquet de chefs d’oeuvre. Et il y a aussi toute la filmographie de Woody Allen, qui jadis garantissait un dimanche soir en couple des plus réussis, à rire et frissonner sous la couette en se sentant plus malin que les Ricains qui l’ont jamais compris, mais qui aujourd’hui, quand on regarde cette idylle entre une fille de 17 ans et son personnage qui en a alors 42, met quelques noeuds au cerveau quand on sait ce qu’on sait.
Maman j’ai raté l’avion (Chris Colombus, 1990)
Peut-on encore regarder candidement cette pure Madeleine de Proust avec des enfants en connaissant la destinée de Macauley Culkin ?
Star Wars IV-VI (George Lucas, 1977 ; Irvin Kershner, 1980 et Richard Marquand, 1983)
Il faudra quand même se pencher un jour sur le trouble érotique autour de Princess Leïla, reposant fondamentalement sur deux thèmes chers à la mythologie grecque : l’esclavagisme sexuel (la scène avec Jabba) et l’inceste (à une poussière d’étoile de passer à l’acte avec Skywalker, rappelons-le).
Les Nuits Fauves (Cyril Collard, 1992)
Il se sait porteur du VIH, donc c’est un martyr. Ok, sauf qu’il couche sans protection avec un paquet de gens (dont sa meuf), donc c’est un gros bâtard. Pendant longtemps, il a fallu vivre avec ce BG problématique, porté aux nues par la critique et une génération mais dont la vie personnelle a largement nourri le film, resté en tous les cas assez cool pour que son film inspire vingt ans après au groupe étendard du malaise post-nineties son nom : FAUVE.
La Vie d’Adèle (Abdellatif Kechiche, 2013)
Le film de l’amour, le film de l’amour libre, qui n’abolit pas pour autant le désir de possession de l’autre. Mais un réalisateur peut-il demander à son actrice de “lécher la morve” d’une autre actrice au nom de l’avènement de l’oeuvre ? Bref, c’est bien la morve dans l’oeil qu’il nous faut maintenant voir ou revoir ce film vibrant.
Irréversible (Gaspar Noé, 2002)
No comment. Voir également Requiem for a Dream (Darren Aronofsky, 2000)
Les Amours Imaginaires (Xavier Dolan, 2010)
Vous vous rappelez votre adolescence, quand vous ne saviez pas ce que out of your league signifiait, et que vous passiez votre temps à tomber amoureux des mauvaises personnes et puis qu’à force de les stalker vous étiez persuadés que vous aviez une relation réelle avec eux ? Ah merde, pas vous, vraiment ? En tout cas, Xavier Dolan en a fait un classique pop et génialement kitsch qui nous replonge dans les recoins d’un espace-temps qu’on souhaiterait oublier.
Showgirls (Paul Verhoeven, 1995)
Lors de la mythique scène de lap-dance d’Elizabeth Berkley (revenue de Sauvés par le Gong) sur Kyle Machlan (venu de Twin Peaks) , assiste-t-on à un génial rite d’empowerment ou à l’enterrement cynique d’une carrière ?
Apocalypse Now (Francis Ford Coppola, 1979)
Le plus grand film de toute l’Histoire du Cinéma. Vu toutes les versions, cinéma, courte, redux, final cut. Et le documentaire de sa femme Hearts of Darkness. Et le saviez-vous ? Les hélicoptères de la scène de la Walkyrie ont été prêtés gentiment par le dictateur philippin Marcos, qui avait posé comme condition qu’entre deux prises, ses gars puissent continuer d’aller bombarder des villages voisins du tournage susceptibles d’abriter des rébellions hostiles au pouvoir. Ce qui fait poser cette question : le cinéma est-il toujours politique ? On vous laisse en débattre lors de votre prochaine Houseparty.
BONUS La petite maison dans la prairie de Laura Ingalls Wilder (de 1973 à 1984)
Comment a-t-on pu en France, pays du progrès et des libertés (lol), promouvoir aussi longtemps cette Amérique ultra-réac, où les petites filles ne haussent jamais le ton, et où le bon père de famille est l’incarnation ultime du chasseur-cueilleur qui veut surtout que rien ne change ?