La culture Hip-Hop prend ses quartiers au cœur de Paris avec La Place sur Seine
Lifestyle - 06.8.2021
On a été à la rencontre de Julien Cholewa codirecteur de La Place et Pimax artiste pluridisciplinaire dans le cadre de l’évènement La Place sur Seine en collaboration avec l’Aérosol et Paris Plages. Après une proposition de la ville de Paris, La Place a pris ses quartiers sur les quais de l’Hôtel de Ville. L’occasion de prendre la parole sur la culture hip-hop.
Passionné depuis l’adolescence par le rap, le Djing et le beatmaking, Julien Cholewa cofonde et gère la programmation du festival Paris Hip-Hop pendant 15 ans.
Mars 2020, Julien Cholewa est nommé en codirection avec Rachel Khan à la tête du centre culturel hip-hop La Place après un appel à candidature de la mairie de Paris lancé à l’été 2019. La prise de fonction est arrivée en simultanée du confinement, le duo a dû s’adapter pour la prise en main du projet, de l’équipement, du bâtiment et des équipes. La Place englobe la musique, la peinture, les arts visuels, la danse avec des prolongements dans le cinéma, la vidéo. Au vu du contexte, l’équipe s’est concentrée sur le développement de la vidéo, des réseaux sociaux et de la création de contenus digitaux.
« Au début des années 2000 on en était pas du tout là. On a beaucoup œuvré pour que le rap, le street art, la danse rentrent dans des lieux de culture parce que ce n’était vraiment pas évident. Maintenant on a l’impression que c’est naturel quand on voit tout ce qui se passe à Paris. Et puis La Place sur Seine c’est une des meilleures illustrations que le hip-hop est pris en compte et que la mairie de Paris pousse dans ce sens-là. »
Les projets de La Place :
La première grosse partie du travail de La Place est l’accompagnement artistique sur la musique et sur la danse. Le lieu permet l’accueil d’artistes en résidence, en création, en répétition avec des studios de répétition, des studios d’enregistrement, différentes cabines de production, une salle de concert et une grande salle pour travailler la danse.
Sur le volet danse, les compagnies accompagnées sont d’abord sélectionnées , par choix de programmation ( Géométrie Variable, Bandidas). Mais, un véritable dispositif d’accompagnement verra bientôt le jour pour structurer davantage cette partie et par exemple permettre à l’artiste associé en danse d’avoir un rôle à jouer auprès des compagnies émergentes.
« C’est pour nous le temps fort sur la création chorégraphique avec des spectacles, de la transmission, des ateliers, des rencontres avec les compagnies…»
Pour la plupart, les artistes rap en résidence sont repérés via le dispositif de Buzz Booster réseau regroupant quasiment toutes les régions françaises. Buzz booster accompagne les artistes sur leur diffusion. D’autres artistes rentrent en résidence par le biais du réseau pro (tourneurs, labels…).
Fin 2020 Live arrangé est lancé avec l’aide de personnalités comme Vicelow membre du Saïan Supa Crew sur la direction artistique de la partie live et le réalisateur Ismaël Mereghetti. Format vidéo de 12min axé sur un rappeur ou une rappeuse qui choisit 2 de ses morceaux revisités avec des musiciens. Le format comporte une partie mini documentaire pour voir le making of de la création et du travail d’arrangement et une partie avec les deux morceaux live captés. Des artistes comme Lala &ce, Kalash Criminel et Le Juiice s’y sont produits.
En mars 2021, la L2P convention est lancée. L2P est un projet ambitieux de convention professionnelle dédiée au hip-hop avec des rencontres, des conférences, des masterclasses, mais aussi des concerts, des spectacles. Cette année, la convention s’est déroulée uniquement en digital mais l’objectif est de pouvoir la faire en physique pour mars 2022.
Il est important de rappeler que La Place est un équipement de la ville de Paris. La localisation de La Place (Canopée des Halles) est un choix stratégique. Châtelet Les Halles est historiquement l’endroit hyper symbolique du mouvement hip-hop. Depuis les années 80, les danseurs sont installés, les magasins de vinyles sont nombreux. Châtelet est le lien entre le centre de Paris et toute l’Île-de-France, toutes les banlieues. Le lieu n’est donc pas choisi au hasard.
« La Place doit avoir un ancrage local dans la canopée des Halles à Paris mais aussi dans sa région au niveau national et international. L’idée est donc clairement de nouer des liens, des partenariats et des jonctions avec les lieux et les acteurs en France. Il y a aussi un rôle de mobilité des artistes de Paris vers les régions et vice versa. »
La Place a eu l’opportunité d’obtenir un emplacement sur les quais de l’Hôtel de ville dans le cadre de Paris Plages. L’occasion pour le lieu de pouvoir prendre plus facilement la parole sur le Street Art grâce à une fresque de 40 mètres sur 3 mètres de haut. En collaboration avec L’Aérosol, La Place a décidé de proposer différents courants, différentes esthétiques, différents types d’artistes.
« On a commencé avec Lady K, Reso, Dize et leurs invités avec vraiment du lettrage et du pur graffiti. Et puis des artistes comme Pimax, MG La bomba où on est sur une vraie composition entre décor, perspective, Street Art et graffiti. Après on va enchaîner avec des artistes comme Kaldea qui est sur du figuratif. C’était important pour nous pendant l’été, de passer par différents univers et différentes facettes, du graffiti au Street Art. On arrive avec un vrai propos sur cette esthétique. »
Véritable lieu de rencontre, La Place sur Seine est pour les parisiens, les touristes, les afficionados, le grand public mais l’objectif est vraiment de réussir à créer un lien et un mélange entre le public passionné de la culture hip-hop et le grand public.
« C’est à la fois un lieu de programmation, d’animation, de transmission avec des ateliers, des workshops, des conférences. On a une vraie volonté de montrer au grand public ce qu’est le hip-hop, les arts urbains »
La culture du hip-hop a explosé dans notre société et constitue aujourd’hui le reflet parfait de la Pop Culture et de la culture populaire. Le rap est la musique la plus streamée, la culture hip-hop se diffuse dans la mode et les grandes maisons de couture, dans les arts visuels et dans la musique de manière générale. Elle est donc influente à tous les niveaux de la culture.
« Dans les têtes d’affiche des grands festivals, on retrouve maintenant automatiquement des artistes issus du rap ce qui n’était pas le cas avant »
Julien Cholewa souligne tout de même le paradoxe d’un manque de festival avec une programmation 100% rap. « Quand on voyage, on voit que l’impact des artistes français à l’étranger est indiscutable. En revanche on n’a toujours pas de grand festival de musique rap donc oui ça nous préoccupe beaucoup. »
FOCUS sur PIMAX
Artiste pluridisciplinaire, Pimax mélange Street Art, sculpture, musique, installation et bosse toujours en musique. À l’occasion de La Place sur Seine, l’artiste a invité quelques potes pour réaliser la fresque de la semaine certains se concentrent sur le décor, les immeubles, le ciel, les perspectives et insèrent des graffitis et des lettrages. D’autres font les personnages entourés de Nourf (Godzilla, King Kong).
« En fonction des potes dispo, des énergies des uns et des autres, la fresque évolue, il n’y a pas de croquis au départ »
Nourf c’est la signature de Pimax mais c’est aussi le chien qui a partagé sa vie pendant 17 ans. Signature un peu enfantine, l’artiste garde un trait volontairement maladroit avec Nourf, comme dit Picasso « J’ai mis toute ma vie à apprendre à dessiner comme un enfant »
« C’est une histoire d’amour entre l’humain et l’animal et en même temps c’est une allégorie de lui-même. Il a ses baskets, il a le poste à cassette. Nourf, c’est un peu un pitbull croisé boxer qui a une sale gueule, il incarne l’histoire du délit de faciès. Mais il est gentil, il est élevé à coup de bisous, il est dans la famille des Simpson, il a les 2 mêmes yeux que les Simpson. Il a ce petit pansement aussi sur le visage qui rappelle le bobo, la souffrance et en même temps avec l’œil, ça fait XO, le bisou. Ce qui est hyper important c’est que dans sa bouche il a une onde un peu comme le battement du cœur mais aussi la musique. Son rythme cardiaque, bat au rythme des énergies et de la musique. Nourf est une connexion entre mon travail de graffeur, de dessinateur, de sculpteur de volume et de musique. »
Entre poser sur un mur ou être exposé en galerie, il n’y a pas de préférence. Selon Pimax, quand le train passe, c’est bien de le graffer mais il faut monter dedans.
Lola Bellamy
Merci à Julien Cholewa et Pimax pour les interviews accordées.