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[ITW] Sparks sont de retour avec un nouvel album

sparks hippopotamus

En 45 ans, les Sparks ont composé 24 albums, sans jamais tomber dans la facilité. Hippopotamus, sorti aujourd’hui, ne fait pas exception. Entretien avec des légendes toujours avant-gardistes.

Salut ! Comment allez-vous ? Comment était le concert à La Cigale lundi soir ?

Ron : C’était génial, Catherine Ringer [ex-Rita Mitsouko, ndlr] est une artiste incroyable. Et La Cigale est une salle tellement connue à Paris, c’était un moment très spécial. Catherine nous a invité à jouer trois chansons : les deux qu’on a composé avec les Rita Mitsouko quand Fred Chichin était encore parmi nous, Singing in the Shower and Live in Las Vegas ; et When I’m With You qui est une de nos chansons. C’était une soirée magique.

Russell : L’atmosphère était très spéciale. La salle était comble, le public arrivait sans cesse. En plus de cela, on a une relation très spéciale avec les Rita Mitsouko, une histoire commune, donc c’était très émouvant. Le genre de choses qui n’arrive qu’une fois dans une vie.

Vous sortez votre nouvel album aujourd’hui, le 8 septembre. Comment vous est venue l’inspiration pour construire un album de A à Z ?

Russell : On ne savait pas trop à quoi ça allait ressembler quand on est entrés en studio, mais ce qu’on savait c’est qu’on voulait quelque chose de provocant, de marquant. C’est notre 24ème album ; quand on a fait autant d’opus, on doit trouver un moyen de rester enthousiastes mais aussi de rendre notre public enthousiaste. On voulait aussi que des gens qui n’ont jamais entendu parler des Sparks puissent découvrir cet album et trouver ça moderne et avant-gardiste. C’est ce qu’il y a derrière tous nos albums.

Pourquoi ça s’appelle Hippopotamus ?

Russell : Ron avait écrit une chanson instrumentale plutôt inhabituelle. On devait trouver des paroles qui allaient avec cette atmosphère, donc l’hippopotame ça nous semblait bien [rires]. C’est l’histoire d’un gars qui trouve un hippopotame dans sa piscine, puis plein d’objets qui riment avec “hippopotamus” : “a book by anonymous”, “a painting by Hieronymus”, “a Volkswagen microbus”, “Titus Andronicus”, “a woman with an abacus”… On ne voulait pas que le titre de l’album soit le même que celui d’une chanson de l’album, parce que ça met une chanson en valeur plus que les autres et on n’aime pas ça. Mais on s’est dit que le visuel de l’album d’un hippopotame dans une piscine serait une image forte.

Et ce visuel, c’était l’idée de qui ?

Ron : En réalité, c’est une représentation littérale de la chanson. On a mis des couleurs fortes pour avoir un style à la David Hockney, avec cette eau très bleue… On est heureux qu’ils aient laissé la pochette sans texte dessus, l’image est beaucoup plus marquante. Grâce au retour du vinyle, l’aspect visuel compte à nouveau ; on en est très heureux.

Comment vous arrivez à rester enthousiastes et innovants après une si longue carrière ?

Ron : L’avantage d’être un duo, c’est qu’on peut se plonger dans différents contextes musicaux qui nous donnent un nouvel élan à chaque fois. Quand on a voulu travailler avec Giorgio Moroder, on a pu le faire sans avoir à prendre en considération l’univers du groupe, puisque notre univers est en adaptation constante. Certes, on a une sensibilité, mais on peut s’adapter à plein de paramètres différents, et ça nous aide à être toujours innovants.

Ces quatre dernières années, on a travaillé sur notre comédie musicale avec Leos Carax. C’est très différent : on ne réfléchit pas de la même manière pour un film d’une heure et demi que pour une chanson de 3 ou 4 minutes. Du coup, quand on s’est mis à l’album on était très enthousiastes.

Justement, vous avez eu des très gros noms de la production sur vos albums (Tony Visconti, Giorgio Moroder…), qui ont eu une influence sur vos sons. Pourquoi avoir choisi d’auto-produire vos albums plus récents ?

Russell : En effet, on a eu de très grands producteurs. Todd Rundgren a été le premier à découvrir Sparks, quand personne d’autre n’était réceptif à notre musique. Ils nous ont tous beaucoup appris. Avec le temps, on est devenus plus confiants et capables de juger nos productions, d’être durs dans la sélection finale des chansons. On a aussi notre propre studio maintenant, donc on est plus indépendants, on peut prendre le temps qu’on veut.

Donc il y a eu un moment où vous vous êtes sentis prêts…

Russell : Oui !

Ron : Oui, et ça coïncidait avec le moment où on a acquis notre studio. Quand on travaille avec un producteur, il faut avoir des ébauches de chanson en arrivant au studio. Là, on peut expérimenter.

Leos Carax a participé à un morceau sur Hippopotamus, et vous avez participé à la bande-son de son prochain film. Comment ça s’est fait ?

Russell : On a fait plus que la bande-son, on a écrit tout le film ! C’était notre projet initialement. On a commencé il y a quatre ans et demi, et quand on est allés à Cannes avec notre projet fini, on a rencontré Leos qui avait utilisé une de nos chansons pour Holy Motors. En retournant à Los Angeles, on pensait en faire un album, et on l’a envoyé à Leos sans attente particulière. Il a adoré, et a voulu en faire un film ; on était honorés qu’il trouve l’histoire et les dialogues suffisamment consistants pour en faire un film.

Donc en réalité c’est votre film, auquel Leos Carax a participé…

Ron : [rires] Oui !

Russell : [rires] C’était notre projet au début, mais c’est un réalisateur très impliqué et une personnalité très forte, donc il l’a remodelé selon sa vision. On l’a vu il y a deux jours, et maintenant il y a des acteurs connus dans la distribution, Adam Driver et Michelle Williams.

Vous pouvez nous en dire un peu plus sur le clip de “Edith Piaf Said It Better than Me” ?

Russell : On a découvert le travail de Joseph Wallace, le réalisateur du clip, en stop motion, et on avait l’impression que ça irait bien avec cette chanson. On lui en a parlé, et c’est là qu’il nous a proposé cette vidéo, avec Ron et moi dans un décor Parisien. Il a très bien compris l’esprit de cette chanson, qui est finalement assez mélancolique, pourtant ce n’était pas chose facile.

Vous avez pris beaucoup de risques pendant votre carrière… Il y a quelque chose que vous regrettez d’avoir fait ?

Ron : Je ne vais pas dire qu’on regrette, mais on a joué nos 21 albums en 21 soirs, un album chaque soir. On ne regrette pas, mais c’était très dur, et on ne le refera pas. Je suis heureux de l’avoir fait, mais ça ne se reproduira pas [rires].

Et maintenant, c’est la tournée Européenne.

Russell : Oui ! On s’est déjà produits en Scandinavie, pour le reste on commence la semaine prochaine. On est très enthousiastes à l’idée de jouer à la Gaîté Lyrique, tout le monde nous a dit que c’était une super salle de concert et un super endroit !

C’est quoi votre définition de la pop culture ?

Ron : C’est de célébrer les objets du quotidien, qu’on regarde parfois de haut, en opposition aux choses prétentieuses, que les gens considèrent comme de l’art… On ne travaille pas dans la musique classique ou le jazz, mais dans quelque chose qui est éphémère. Réussir à faire quelque chose d’intemporel dans la pop, c’est très intéressant. On a grandi à Los Angeles, qui est une ville très “pop”, avec des voitures et des panneaux publicitaires géants. Notre esthétique est donc en grande partie influencée par une ville qui a une histoire très récente ; notre héritage c’est les voitures et le surf. La pop c’est un peu une forme bâtarde d’expression artistique, mais on peut aussi le rendre plus substantiel. Cette réponse est beaucoup trop longue [rires].

Vous avez l’impression de faire partie de la pop culture ?

Ron : On en fait partie, mais on a aussi un pied en dehors. Mais ce n’est pas un terme négatif, au contraire, on adore la pop culture ! Quand on va au musée, ce qu’on préfère c’est la boutique [rires].

Russell : Tout est là, pourquoi s’embêter à faire tout le musée quand tout est concentré ici ? En plus on peut l’acheter, que demander de plus [rires] ?

Ron : On est peut être un peu superficiels, mais c’est le genre de choses qu’on aime. Bon, c’était un peu n’importe quoi cette réponse [rires]. Désolé, il faudra le réécrire mieux [ndlr : on l’a fait].

Vous pouvez acheter ou écouter Hippopotamus ici.
En concert à la Gaîté Lyrique le 1er octobre – lien de la billetterie.