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[ITW] JEAN LOUIS BROSSARD

Nous avons interviewé Jean Louis Brossard codirecteur des Trans Musicales de Rennes et acteur de longue date du paysage artistique français. Ce rendez-vous artistique réunit chaque année plus de 65 000 spectateurs qui débarquent des quatre coins du globe. Plus qu’un festival, c’est toute une ville qui depuis 38 ans se mobilise pour accueillir les fans de rock, de hip-hop et de musique électronique.

Il y avait-il une culture rock à Rennes avant les Transmusicales ? En quoi Rennes est aujourd’hui une ville Rock ?
Oui et non, Il y avait en effet quelques concerts, un tous les deux mois environ. On retrouvait sur scène des groupes tel que Magma, Gong ou encore Khan. Aujourd’hui à Rennes il y en a une trentaine de concerts par soir, c’est quelque chose d’assez fou quand on y pense.
Je ne sais pas réellement si la ville était « Rock » à la base mais les gens ont commencé à en parler de plus en plus suite à la première édition des Transmusicales en Juin 1979. Marquis de Sade, Les Enfants du Marquis, les Nus, Ubik et Etienne Daho ont été les premiers à marquer l’histoire. C’est eux qui ont amorcé la scène musicale rennaise. C’est aussi grâce à eux que d’autres genres tels que le hip-hop ou la musique électronique s’illustrent aujourd’hui sur cette scène, ils ont ouvert la voie.
Rennes est une ville étudiante qui a toujours été très musicale. Elle a su véritablement canaliser cette énergie artistique. Une ville rock … dans l’esprit certainement, mais c’est avant tout une ville musicale pour moi.

Vous êtes en grand collectionneur de disques, quelle est la ville qui vous a le plus inspiré sur le plan musical ?
Je suis très souvent parti à Londres chercher la musique que l’on ne trouvait pas ailleurs.
Au début, j’habitais Saint-Brieuc. J’ai débarqué à Rennes au milieu des années 1970 et le premier endroit où j’ai mis les pieds s’appelait «  Disc 2000 » – c’était là où travaillait Hervé Bordier. Là bas, il était possible de trouver des imports américains introuvables à Saint Brieuc ou la boutique de l’époque vendait aussi de l’électro-ménager.
Vers 1976, 1977, en pleine période Punk, je suis souvent parti à Londres où j’achetais beaucoup de 45 tours : The Damned, Sex Pistols, The Clash et beaucoup d’autres groupes bien moins connus, pour moi d’ailleurs c’est eux qui font la musique, pas seulement les groupes connus mais les autres.

Voyez-vous d’autres villes de « province” où le rock ait eu une place aussi importante ?
Il y a des villes de musique c’est clair, j’aime beaucoup la scène de Caen, qu’elle soit électronique avec Superpoze ou Fakear mais aussi avec des groupe comme GaBlé ou encore Grand Parc. Il y a une très belle scène du coté de Nantes aussi, et quelques ovnis dans l’Est et du coté de Marseille.
J’ai l’impression que dans le sud c’est un peu moins rock qu’ailleurs. Peut être parce qu’il fait plus chaud. En Bretagne, en Normandie ou plus généralement dans le Nord, on fonctionne un peu comme les Anglos Saxons. On se retrouve souvent dans des bars pour assister à des concerts, il fait froid et on a besoin de se resserrer les uns contre les autres, de bouger, de partager quelques choses en écoutant de la musique. Dans le sud, il y a de belles terrasses et du soleil toute l’année, chez nous il pleut souvent mais on a de la belle musique.

De l’Ubu au Parc d’Exposition, comment sont nées les Transmusicales ?
Les Transmusicales sont nées avec avec Beatrice, Hervé, Jean-René et moi-même, tout simplement de l’envie de montrer la scène rennaise aux rennais. On a eu envie de faire sortir des groupes que l’on aimait et qui jouaient autour de nous dans des petites MJC, ou des petits bars de quartiers. C’était l’occasion de les faire monter sur une véritable scène. C’était à la Salle de la Cité en Juin 1979 durant deux Jours.

Que s’est-il passé avec les Béruriers noir ?
La première fois que j’ai accueilli les Béruriers Noirs c’était le 14 Décembre 1986 avec une soirée qui s’appelait la Fiesta Bérurière dans la Salle de la Cité. Ils jouaient aux cotés de Ludwig Von 88,  Washingtons Dead Cats et Wart, un groupe rennais. Les Béruriers avaient leur propre sécurité, des gens très coolx tout à fait charmants, ça c’est très bien passé à l’exception de quelques rangées de fauteuils arrachés, ca fait aussi partie du rock. Aujourd’hui, nous sommes assez potes et lorsqu’il a fallu répondre à l’appel pour les 25 ans des Transmusicales, il m’ont dit ok, on a envie de rejouer, de revivre les Trans. J’étais extrêmement heureux de les voir se reformer pour cette grande occasion. Tout était complet cette année là. C’était le bordel dehors car plein de gens voulaient rentrer quand même, c’était un peu la bagarre entre les CRS et quelques fans.

D’ou viennent vos inspirations musicales ?
J’ai un background classique mais c’est quand j’ai découvert le rock à la radio que ça a changé ma vie. J’écoute beaucoup de jazz, de la soul et du funk. De toute manière en musique, Il faut bien connaître le passé pour connaître le présent et le futur. En tous cas c’est le cas dans le boulot que je fais.

Quel est votre rapport au vinyle?
Je suis toujours resté très vinyle, certainement par habitude parce qu’à la base, on n’avait que ça. Je m’aperçois aussi d’une chose, quand je fais un concert à l’UBU, lorsque les groupes sortent leur marchandising, la première chose qui part, ce sont les disques vinyles, les fans sont contents d’avoir un vrai disque entre les mains, avec une belle pochette et un travail graphique derrière. Souvent les disques sont dédicacés par les groupes après leur concert. La dimension de l’objet est importante.

Les gens se remettent à acheter des vinyles car c’est un autre son, tu peux aussi lire les textes, ce que tu ne peux pas vraiment faire sur un cd. Il y a aussi une dimension olfactive, une odeur particulière, lorsque tu choisis une seconde main comme un disque de jazz par exemple, il y a une odeur d’humidité particulière du fait qu’il ait traîné dans une cave, comme une bouteille de vin en quelque sorte.

Quelle est la place des femmes aux Trans ? 26 groupes  féminins sur 98 sont  à l’affiche.
26 groupes féminins sur 98 c’est beaucoup mais je n’y suis pas pour grand chose, c’est seulement des artistes que j’ai aimé et que je souhaite montrer au public, cela montre que les femmes sont beaucoup plus présentes aujourd’hui sur la scène musicale tout simplement.

Pouvez-vous nous parler des initiatives sociales, de la dimension sociale des transmusicales ?
Il y a eu pendant des années des concerts organisés dans les prisons. Les artistes se sentaient un peu comme Johnny Cash à San Quentin.  La culture ne doit pas oublier les gens qui sont exclus de la société. Cette année on va aider des gens qui n’ont pas beaucoup d’argent avec des places à des tarifs très bas, on a aussi la capacité  d’accueillir des sans-abris et des demandeurs d’asiles. C’est l’humain qui prime avant tout pour nous, c’est ça l’esprit des Trans.
Cette année, c’est aussi la deuxième Edition du concert des familles. C’est marrant parce que les enfants et les parents peuvent un moment magique ensemble. Là, je leur ai choisi un groupe très fun qui s’appelle les Barberettes, un groupe Sud Coréen composé de 3 chanteuses. Je les ai vus sur scène à Brighton et sur un festival Great Escape, ça m’a beaucoup touché, à ne pas rater.

Quelles musiques écoutez-vous pour vous redonner la pêche ? Un titre qui a traversé le temps ? Un vinyle dont vous ne pouvez plus vous séparer ?
Quand je suis en baisse de jus, je me mets un bon disque de Freejazzz, un petit Albert Heller (New Grass), ça dépote fort, je mets ça à fond et là ouaouh ! Ca peut être aussi un morceau d’un groupe qui s’appelle The Sid Presley Experience, un groupe que j’ai fait au Trans il y a longtemps, il s’agit d’un maxi 45 tours, un morceau qui dure 2 min avec un son extraordinaire, il s’appelle Public Enemy Number One !

Quelle est votre définition de la pop culture ?
Je sais pas si c’est une définition de la Pop Culture, en tout cas c’était celle des années 60 : Portobello, l’Angleterre, une façon de s’habiller, une façon de découvrir la musique. Pour moi la pop culture c’est les groupes sixties, ils avaient un look, une gueule. Maintenant la pop culture c’est une chemise à carreau et une barbe peut être ? je sais pas haha.
La Pop Culture, c’était un changement de mœurs. Il y a eu une époque où la différence musicale entre ce que tes parents et toi écoutaient était grande. La vie n’était pas la même et maintenant tu as moins cette différence là. Les gens peuvent se retrouver sur des concerts où le rock côtoie le hip hop, il y a plus de mélanges entre les âges et les genres.


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