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[POP ART] Adèle Gratacos est une artiste inépuisable

Adèle Gratacos expose un travail immersif et protéiforme à la maison européenne de la photographie

Tout juste sortie de la prestigieuse école de La Cambre en Belgique, la jeune artiste s’attaque au bel espace de la MEP, pour lequel elle a conçu un parcours sensible, en forme d’expérience pour qui s’y aventure et intitulé “Est-ce si épuisant de scruter l’invisible?”. Photo, film, texte, sculpture et installations, Adèle Gratacos met en place une manière d’explorer sa façon d’être au monde et tend ainsi un miroir plein de questions à ses spectateurs. Rencontre.

C’est vraiment si difficile alors, de scruter l’invisible ?
Plus exactement : “Est-ce si épuisant de scruter l’invisible ?”. Pour te répondre, voici un passage de Jean Genet : “Il devrait être question surtout de ceci : une révolution en est-elle une quand elle n’a pas fait tomber des visages et des corps la peau morte qui les avachissait. Je ne parle pas d’une beauté académique, mais de l’impalpable – innommable- joie des corps, des visages, des cris, des paroles qui cessent d’être mornes.”

Utiliser le principe de la citation, tant visuelle que littéraire, c’est un moyen de revendiquer un certain héritage ou plutôt de rendre hommage ?
Être hanté, habité par des présences, très fortes qui créent un sol ferme de la même manière que l’être aimé est un phare dans le brouillard. Ces héros sont de réels murs contre la bêtise, contre l’ennui, contre la neutralité. Tous, sont des êtres qui se sont engagés, qui ont pris position. En cela ils ont ouvert des failles par lesquelles il est un cadeau de pouvoir regarder. Et moi, je veux y mettre le doigt, comme Saint Thomas !

Tu es une artiste pluridisciplinaire, par choix ou simplement parce que tu ne parviens pas à t’attacher à un seul medium ?
“Pluridisciplinaire” est un mot qui n’éveille rien en moi, de même que les soucis esthétiques de mediums ne m’appellent en aucun cas. C’est la fragilité qui relève du contenu des choses qui me parle, c’est le contact entre ces choses, ces êtres, comment on se donne à quelqu’un. Dans ce cas-là, un titre pour moi est un “medium” au même titre qu’un fil de fer ou une larme contenue, et chaque forme qui est créée, qu’elle soit visuelle, textuelle ou sensorielle est un point de clarté que l’on exige.

Qu’est-ce qui te plaît le plus dans le travail photographique ?
C’est le montage qui me passionne ! Le regard d’un temps sur un autre, d’une plaie à l’autre.

À d’autres jeunes et plus jeunes artistes, recommanderais-tu de passer par une école ? Pourquoi ?
Tout d’abord, j’y ai fait très peu de rencontres mais elles sont les plus importantes. Aussi, j’y ai appris à me positionner, à me créer des barricades contre la peur, contre ce monde qui tourne de plus en plus mal ! Et tout ça, non pas parce que l’école est contre ce monde, mais justement, parce qu’elle l’épouse parfaitement.


“Est-ce si épuisant de scruter l’invisible ? Cartographie plurielle d’un visage” sera exposée à la MEP du 19 juillet au 25 août 2019

Agathe R.