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[POP TALK] Qui est Uèle Lamore, cheffe d’orchestre de 25 ans ?

Comme quoi, un chef d’orchestre n’est pas toujours un vieil homme blanc voûté et dégarni

Uèle Lamore n’a pas le temps : jeune, brillante, curieuse et aujourd’hui excellente dans une profession qu’on ne prête -souvent- qu’aux hommes, la franco-américaine s’est émancipée de sa formation classique pour explorer et inventer des zones musicales singulières. Après avoir travaillé avec Agar Agar, Renart ou Etienne Daho, la cheffe d’orchestre propose aujourd’hui la bande originale du festival Séries Mania, dans une proposition précise Du violon de ces cinq ans à la guitare jazz, Uèle Lamore est une multi-instrumentiste qui se respecte et dont l’éducation au Berklee College of Music de Boston lui a ouvert les portes de la direction orchestrale. Une révélation et un diplôme plus tard, la jeune femme avance à grande vitesse et, au-delà de multiples collaborations, elle dirige aujourd’hui  l’Orchestre Orage, le premier orchestre de Musiques Actuelles de France, un ensemble de 34 musiciens spécialisé dans le live et la création originale.

Est-ce que tu arrives à poursuivre une pratique instrumentale régulière malgré ton activité de cheffe d’orchestre ?
Plus tellement, avant je jouais facilement 5 à 6 heures de guitare par jour. Maintenant je passe mes journées devant l’ordi et mes machines à arranger et composer, donc plus trop le temps de faire mes gammes et rudiments ! Cependant, je me mets au piano de plus en plus et j’essaye tous les jours de travailler un peu plus ma technique.

Ton âge comme ton genre te sont-ils souvent rappelés dans le milieu ?
Oui, c’est un sujet qui revient continuellement mais qui ne m’intéresse pas plus que ca.

Tu as dit à Brut que pour toi la direction orchestrale c’était comme du management, c’est un métier lié à l’humain plus encore qu’à la musique ?
Complètement, c’est même avant tout lié au relationnel. On peut être super bon techniquement parlant, et être le/la pire chef.fe possible si on n’arrive pas à tisser des liens avec les musiciens. Il faut bien comprendre que les musiciens n’ont pas besoin de nous pour jouer leur partition et qu’ils connaissent mieux leur instrument que quiconque. En tant que cheffe, mon role est de fédérer l’ensemble, d’instaurer une dynamique efficace de travail et de générer harmonie et cohésion au sein du groupe, ce qui inévitablement se fera ressentir dans la performance musicale et l’ élèvera. C’est donc un travail d’équipe avant tout.

Comment composes-tu avant de faire travailler un orchestre ?
Ça dépend vraiment de ce que je dois faire. Une musique de film, un arrangement, une création, parfois des transcriptions… Chaque cas amène à une manière spécifique d’appréhender le “work flow”. Mais lorsque que je sais que la musique va être jouée live, je m’imagine toujours visuellement les musiciens en train de la jouer, les mouvements d’archets, les pêches des percussions… Ça me permet de vraiment créer une bulle méditative où je me projette dans le futur en quelque sorte. Sinon il y a toujours un travail de recherche et de discussion avec l’artiste, groupe, réalisateur pour vraiment cerner les envies et essayer de les concrétiser le plus fidèlement possible !

Tu as étudié aux Etats-Unis, vois-tu une différence avec la France dans la façon de travailler et la perception de la musique en général ?
Oui, et pour avoir vécu longtemps là-bas, je peux dire que je préfère comment les choses sont faites en France. Aux Etats-Unis tout va très vite, c’est sûr, et on a le sentiment que tout est très efficace et bien huilé, ce qui peut vraiment attirer au premier abord. Mais sur le long terme, tout est justement trop rapide, dur, on ressent une violence constante et la réalité c’ est que les gens sont vraiment en mode “manger ou être mangé”. En France la vie est vraiment plus facile, et surtout les gens s’intéressent vraiment à l’art et à la culture et chérissent cela, et on se sent aidé. Après bien sûr, artistiquement en France, la musique n’est pas aussi diversifiée que dans les pays anglos-saxons et certains styles sont même inexistants, mais la nouvelle génération est en train de changer les choses.

Talk Agathe R.