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[ITW] David Blot

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David Blot démarre chez Radio Nova (92) où il anime le “Blotjob”. Egalement co-fondateur des soirées RESPECT avec Jérôme Viger-Kohler et Frédéric Agostini, ils s’exportent dans le monde entier : du Queen (Paris) au Twilo (NYC) en passant par Copenhague,  Bruxelles, Australie ou Singapour

Salut David, et si je te disais : David Blot présente David Blot ?

(Rires) et bien… Jusque-là c’est quelqu’un qui essaye de toujours faire ce qu’il a envie de faire. Dans différents domaines parce qu’il y a différentes choses qui m’intéressent et j’espère avoir le luxe de le faire encore longtemps, mais je me mets fréquemment en danger, je n’ai jamais été salarié nulle part, même pas ici (Nova), donc il faut aussi prendre des risques.

Les risques ont valu la peine pour l’instant ?

Pour l’instant bien sûr, ils permettent de m’affirmer tout en restant indépendant, ce n’est pas le truc le plus confortable, mais je ne regrette pas ! Après je travaille toujours avec des gens, je ne suis pas solitaire ; que ce soit dans la BD avec les dessinateurs, dans les soirées avec Fred Agostini et Jérome Viger-Kohler, à la radio avec les gens de Nova, j’aime bien travailler avec des gens quand même. Tu sais, je pense que c’est quelque chose propre à notre génération, parmi les premières personnes qui ont écouté ici de la House de la Techno, il y a toujours eu un esprit très libre. Après je vois les DJs de mon âge, c’est quand même un peu chaud quoi, je suis content d’avoir arrêté les soirées (Respect) et retrouvé la radio quoi.

Oui la sécurité de l’emploi quand tu es DJ on a vu mieux…

Oui voilà c’est pour ça, entre 20 et 30 ans c’est cool mais après tu as une espèce de fatigue naturelle qui s’installe. Et puis gagner 300 euros pour un set quand tu as 20 ans c’est bien, 30 ans c’est moins bien, et à 40 ans tu ne t’en sors pas.

Quel est ton meilleur souvenir de la période « Respect » d’ailleurs ?

C’est dur de te dire « meilleur » souvenir… La Playboy Mansion fait évidemment partie des choses les plus folles oui, mais en règle générale, tout ce qu’on a fait avec Respect était fou. On a fait ça pour le plaisir, à la base on ne voulait même pas être payé ! Mais toute l’histoire a été folle. On a eu du succès tout de suite, c’est arrivé en même temps que la French Touch, que nous avons accompagné de toute façon, et puis on est allé dans le monde entier, on n’imaginait pas ça un instant. Je suis également assez fière que ma BD avec Mathias Cousin, ‘Le Chant de la machine’ ressorte. Elle est sortie chez Allia qui est un super éditeur, et je pense que ça va nous ouvrir d’autres portes notamment des traductions à l’étranger.

Tu as envie de produire une deuxième BD ?

Oui j’ai envie de m’y remettre, l’année prochaine je pense que je vais me pencher plus sérieusement dessus, l’émission dure 3h actuellement et c’est trop long, je compte reprendre ce temps pour écrire. Je ne me projette pas beaucoup, mais faire de la radio et écrire des scenarios me paraît être un bon équilibre. Ce qui est drôle c’est que ce n’est vraiment pas la même chose, écrire tu le fais posé, en solitaire, alors que ce qui m’excite vachement avec la radio c’est que c’est du direct, une fois que c’est fini c’est fini. L’écriture c’est l’inverse, tu dois te projeter, et prendre ton temps.

Tu as toujours été un curateur, que ce soit pour la musique ou pour les soirées… je fais allusion à une émission qui s’appelait le « Blot Job » tu peux nous en parler ?

« Blot job » c’était Jean-François Bizot le fondateur d’Actuel et Nova qui avait trouvé le nom, et c’était une émission proche de celle que je fais aujourd’hui avec Sophie Marchand, une émission avant tout musicale. Sinon je suis arrivé à Nova tout jeune, 21 – 22 ans ils m’ont mis aux bons plans dans la première émission d’Edouard Baer et Ariel Wizman qui s’appelait « Mouvements de jeunes » renommée ensuite « La Grosse Boule ». On m’avait mis aux bons plans, alors que je ne sortais pas beaucoup, enfin je ne me mettais pas des races jusqu’à 7h du matin quoi, et je n’étais pas du tout clubbing. Nova m’a mis là alors il fallait bien que je sorte un peu. Tu sais je l’ai déjà dit mais je suis d’une génération plus Inrockuptible, de la première formule des années 80 qui n’a rien à voir avec aujourd’hui, celle des Smiths et New Order, proche de l’ambiance intimiste. Le club ce n’était pas ma culture, j’ai commencé à sortir avec les raves et à découvrir la culture club dans un second temps.

Pour toi la French Touch correspond à une période musicale, ou au fait qu’un artiste français s’exporte ?

C’est les 2, c’est effectivement une période, un phénomène qui arrive à la première moitié des années 90 et qui se concrétise dans la 2eme moitié, c’est la première fois qu’un truc comme ça arrivait, alors première fois ça mériterait d’être explicitée : c’est-à- dire qu’il y a eu de la disco française mais qu’elle n’était pas associée directement à la France, les américains, qui écoutaient Village People ne se disaient pas que c’était français, Jean Michel Jarre était anonyme donc ce n’était pas la French Touch au sens propre. Je veux bien être contredit mais ça m’étonnerait qu’il y ait eu des papiers en Angleterre ou au Etats-Unis sur une french disco spécifique, après tu as eu une petite scène hyper bien musicalement au début des années 80 avec Elli et Jacno, qui a eu le droit à une couverture du New Musical Express qui est un peu la bible en Angleterre mais ça a duré une « Une » quoi.

Quand j’ai grandi dans les années 80 – j’aime bien être précis là-dessus pour ne pas avoir de faux procès après – la France c’était la lose totale ! c’est-à- dire que l’on se gargarisait de groupe comme Téléphone dont personne n’avait rien à faire à l’étranger, et encore heureux qu’il y avait des Etienne Daho, des Rita Mitsouko ou plus tard Les Négresses vertes ou Mano Negra mais c’était minime, on était vraiment le trou du cul du monde, particulièrement dans la musique électronique, un désastre. Les mecs habitant Lille allaient en Belgique pour écouter de la techno. Et dans toute l’Europe c’était pareil, il y avait des trucs en Italie, en hollande, partout, la France elle était très rock et funk, donc la House qui était un bébé disco ça ne passait pas. Tu avais l’école Rock qui était les Inrocks et Rock & Folk on va dire, et puis l’école Black Music qui était un peu radio Nova. La House avait vachement de mal à se mettre là-dedans parce que ce n’était pas trop la culture. S’il n’y avait pas eu les Daft Punk ça aurait été intéressant de voir ce que la French Touch aurait donné, mais d’un autre coté il y a d’autres groupes majeurs comme Air, (comme dit fred « Air c’est drôle ce n’est pas du tout de la House filtrée ») mais c’est vrai que les Daft, Phoenix et je peux en citer des dizaines d’autres, c’est des groupes qui ont eu un impact à l’étranger. Je pense que la French Touch a été conçue pas les étrangers, musicalement les français la faisait, mais les étrangers l’ont propulsé. C’est un détail, mais un tournant pour moi, c’est quand j’ai vu Tony Humphries dj mythique du New Jersey mettre Saint Germain dans sa playlist, je n’avais jamais vu un dj américain ou anglais mettre un français dans sa playlist avant ça, c’était vers 93… Bon il y a l’exception qui confirme la règle – je le rappelle à chaque fois – c’est Laurent Garnier. Ce n’était pas le seul bon DJ français il y avait des Erik Rug, Jerome Pacman, Guillaume la tortue et d’autres, mais Garnier était le seul qui s’exportait, le seul. Bon après évidement il y a eu une deuxième vague, les Phillipe Zdar, et Dimitri From Paris.

Penses-tu qu’on pourrait revivre avec la même intensité une nouvelle French Touch ?

Alors, il y a deux choses premièrement ça ne s’est jamais arrêté, je pense à Sebastien Tellier, Jackson, Ed Banger, Justice ou plein de jeunes producteurs house aujourd’hui qui ont un impact à l’étranger… Par contre effectivement des petits promoteurs de soirées à Paris se retrouvant bookés chaque semaine pendant 5 ans à Copenhague, au Twilo à New-York ou en Australie pour faire des soirées ça me parait compliqué… Pour prendre l’exemple de Concrète aujourd’hui, on était loin du niveau de professionnalisme qu’ils ont, on été juste nous trois dans la chambre de Jérome, mais pour remettre les choses dans le contexte, à notre époque il n’y avait rien, 1 ou 2 soirées par semaine peut être 4 le week-end dont 1 rave et 2 soirées en club. Je reviens là-dessus, mais je vois encore les Daft Punk se faire jeter des platines, Dimitri n’était booké nulle part, personne ne voulait faire jouer ses gens-là, c’était trop ouvert d’esprit. On était dans les années 90, tu mettais une vocal de house disco dans un morceau techno tu te faisais dégager des platines manu militari, et le hip hop dans les soirées House c’était pareil. Aujourd’hui les gens sont beaucoup plus ouverts d’esprit musicalement, et je serai bien en mal de faire des soirées parce que j’ai l’impression – et je le dis sans prétention – de voir des bébés « Respect » partout, je prends un line up de concrète, alors quand c’est techno c’est moins notre culture, mais sinon ils font jouer des mecs qu’on a déjà fait jouer ou qu’on aurait pu.

Concernant les soirées « Respect » tu déclarais que vous alliez dans le monde entier, que vous vous occupiez des Flyers, du Line Up. Les promoteurs des clubs du monde entier vous bookez pour quoi exactement ?

Pour la marque, pour l’esthétisme, et pour les contacts des DJs qu’on avait, à force de les voir, ce n’était pas compliqué d’appeler (Philippe) Zdar (Cassius), Dimitri (from paris) ou même Bangalter (Daft) on se voyait régulièrement. Oui donc en fait vous étiez des prometteurs de soirées au 4 coins du monde ? Oui c’est tout à fait ça, on insistait vachement pour avoir nos visuels, mais on ne déléguait pas les soirées, c’est-à- dire qu’on y allait, par contre évidement que ce n’était pas nous qui gérions la sécu ou le bar, on n’était producteur de rien, on prenait un flat fee qui souvent couvrait uniquement les voyages et les hôtels, et on profitait…

Soirée Respect à New York (Twilo)

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C’est quand même incroyable (rires)

Je suis d’accord…

Ok, parlons de toi un peu. Si tu devais me citer un artiste qu’il faudrait surveiller de près ?

Waow, hum.. je pourrais t’en citer plusieurs en cherchant, mais je trouve qu’il y a cet Américain « Francis and the Lights » qui est vraiment doué, bon le mec a déjà travaillé pour Kanye West ou James Blake donc ce n’est pas n’importe qui. Il a fait un concert au pop up label il y a quelques mois et ça me fait rire de voir qu’il joue dans des petits endroits alors que le mec est quand même brillamment doué, il a de quoi être une grosse star Mainstream. Pour l’instant on ne l’a pas encore vraiment découvert en France, ça viendra.

Ton dernier coup de cœur ?

Chaque semaine ça change, je dois écouter 200 morceaux par semaine, donc dur de t’en citer un, non mais l’album de Kendrick Lamar est cool non ?

Ton festival préféré ou ton idéal de festival ?

J’irais bien au Montreux Jazz Festival ou au festival de Salzburg, mais ça n’a rien à voir avec les musiques électroniques, mais sinon je n’aime pas trop les festivals, je déteste faire la queue partout, les tokens, tous ces trucs anti festif au dernier degré. J’aime bien soit avoir le confort des mini clubs soit des raves. Je sais bien qu’il y a des festivals cools, mais sur le papier j’ai passé l’âge. Les lieux où tu aimes te balader à Paris ? Putain mais je ne sors plus du tout moi ! Non mais pour manger ou boire un verre (rires) ! Ah ok, j’habitude dans le centre de Paris, près de la rue Montorgueil (et je déteste ma rue) donc je marche tout le temps, donc soit je vais manger rue saint Anne chez des japonais, soit rue du Faubourg Saint Denis chez l’indien musulman au bout de la rue à 8 euros le plat. Pour les bars – là je vais faire un peu vieux con – mais je préfère quand même le vieux bar un peu pourri tenu par des aveyronnais que le truc qui a été refait à neuf et qui est hyper cher.

Montreux Jazz Festival

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Si tu étais un lieu et une époque ?

Je pourrais t’en dire plein, j’aurais rêvé d’aller au Loft de David Mancuso, mais le vrai à New York, au Paradise Garage, à l’Hacienda, ou au Palace de la grande époque. Sinon les clubs de jazz des années 30 / 40, les gens étaient libérés, fumaient et parlaient à leur table tout en écoutant la musique. Je n’aime pas les concerts parce qu’il n’y a plus de libertés je trouve.

Paradise Garage

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Ok dernière question, quelle est ta définition de la Pop Culture ?

Pour moi la Pop culture c’est un truc des 30 glorieuses, historiquement le mot « pop » date de cette période-là, alors malheureusement on en sort un peu quand on voit le monde dans lequel on est, mais je dirais que c’est une espèce de période post guerre liée à l’adolescence, ou à la jeune vingtaine. Quand je vois des photos de mon père à 13 ans en 40 on dirait un gamin de 8 ans, et quand je vois des photos de lui à 18 ans on dirait un mec de 30 ans, il n’y avait pas d’adolescence. La pop culture c’est le début de l’adolescence. Ca peut être vue comme un signe de déclin, de gens qui se foutent un peu des questions politiques et tout ça, mais à la fois c’est le signe que ça va mieux donc espérons que cela continue à aller mieux, ce n’est pas gagné (rires)

Le Nova Club du lundi au jeudi sur Radio Nova 18-21h.

« Le Chant de la Machine » de David Blot et Mathias Cousin (Allia)

PDM